Chronique du Dimanche 02 août 2015
Chanteur très anxieux
Pierre-Henri S. (jeune ténor de 23 ans, victime d’une anxiété « paralysante »)
Bonjour,
Je vous contacte car je suis intéressé pour prendre des cours de chant avec vous. Je suis ténor lyrique (amateur débutant).
Après
un semestre dans un chœur étudiant, encouragé et prenant beaucoup de
plaisir à chanter, j'ai pris un an de cours au conservatoire municipal
de(x)durant l’année 2012-2013. Mon problème a été double : une forte
anxiété m’a constamment handicapé à la fois avec le professeur (Mme X)
et en chœur, tant est si bien que la qualité de ma voix (et ma
confiance et mon estime envers elle) ont globalement décliné. En
parallèle, j’avais des problèmes à la mâchoire (bruxisme nocturne)
entraînant douleur et gêne dans l’ouverture. En conséquence, j’ai
arrêté cours et chœurs en septembre 2013. Depuis, j’ai poursuivi mon
chemin et, mes problèmes de mâchoire s’étant grandement améliorés, j’ai
entamé un travail psychologique. Aujourd’hui, je souhaite recommencer à
apprendre à chanter en lyrique. Votre cours m’a été conseillé et je
pense qu’un travail avec vous me serait bénéfique. J’aimerais donc
pouvoir vous rencontrer et envisager un bilan vocal.
Mon téléphone est le (x).
Bien cordialement
Pierre-Henri
Ma réponse :
Pierre-Henri,
Je
viens de lire votre mail. Je comprends que tous ces problèmes vous
aient inquiété mais vous avez raison de vouloir persévérer. J'ai connu
des cas très difficiles qui ont été résolus au mieux : donc, ne perdez
pas l'espoir, on y arrive ! Avant tout, il faut en effet faire un bilan
vocal pour que nous puissions parler plus à fond de ce qui vous
inquiète, tester votre voix et déterminer la "stratégie" qui nous
permettra de résoudre au mieux votre souci.
Je vous appellerai très vite sur votre mobile pour que nous convenions d'un RV.
Bien cordialement
Jean Laforêt www.jean-laforet.fr
Bilan vocal
J’ai
reçu Pierre-Henri quelques jours après cet échange de mails. C’est un
jeune homme sympathique dont la grande motivation ne fait aucun doute !
J’ai néanmoins tout de suite senti chez lui un certain mal-être,
certainement dû aux problèmes psychologiques dont il me parlait dans
son mail.
Au cours du petit questionnement qui
précède les tests proprement dits et après que nous ayons évoqué
longuement son principal souci, l’anxiété (accompagnée naturellement de
timidité et d’émotivité), nous avons parlé en détail de son ressenti
vocal. Tout d’abord, il me dit être gêné par un certain manque de
souffle. De plus, il trouve ses aigus serrés et ses graves faibles. Il
m’apprend aussi qu’il fréquente actuellement une chorale et que sa voix
se fatigue parfois très vite. Il ajoute que la raucité qui s’installe
alors, peut durer… la récupération vocale étant parfois très lente.
Il
me confirme aussi que son état psychologique lui cause un mal-être
certain et me rappelle qu’il suit une psychanalyse depuis quelque temps.
Les tests généraux
Ils ont eu lieu torse nu et ventre libre.
Pour débuter, Pierre-Henri a chanté un extrait d’une chanson de Michel Polnareff que j’ai écouté avec plaisir.
En
fait, il possède un joli timbre de ténor. Dès cette première écoute,
j’ai pensé que sa voix était loin de posséder son plein potentiel. En
revanche, elle est très juste et promet de faire de gros progrès en
intensité car, dans le test d’appel, réalisé juste après - test qui
consiste à crier pour prévenir d’un danger immédiat une personne située
assez loin –, Pierre-Henri a déployé une belle puissance, tout à fait
insoupçonnable auparavant !
La petite
vocalisation qui a suivi m’a définitivement convaincu que mon chanteur
avait toutes les chances de retrouver une voix qui lui plaise. (*)
(*)
En effet, au cours de ces exercices, il a sans cesse montré
d’excellentes dispositions générales, comprenant bien mes indications
et parvenant à rectifier sur-le-champ les petites imperfections
techniques que je lui indiquais au passage.
Principaux défauts relevés
Ils
étaient ceux des débutants : ouverture de gorge, respiration et appui
dynamique. De plus, Pierre-Henri a peur de se lancer… Tout cela
s’arrangera progressivement car sa voix est tout à fait saine, c’est
l’essentiel ! Il suffira de la guider sur de bons « rails » pour
qu’elle progresse et se fortifie naturellement.
Pour
l’instant, il ne sait pas encore « passer » correctement en régime
aigu, serrant beaucoup sa gorge aux abords de la zone de passage. A ce
moment « crucial », les maxillaires sont mal « bâillés » et le larynx
monte assez allègrement. (*)
(*) Tableau général auquel je suis, bien sûr… très habitué.
Voir à ce sujet le billet : « Le bâillement technique du chanteur »
De
surcroît, Pierre-Henri a l’habitude d’inspirer « verticalement » avec
un léger soulèvement des épaules… alors que son ventre (aidé en cela
par une cambrure assez accentuée) reste pratiquement en place. (*)
(*)
A mon avis, ce mauvais automatisme ne devrait pas résister longtemps à
quelques exercices de taïchi. Pour l’instant, il perturbe l’appui
naturel et « s’allie » à la cambrure pour gêner la respiration dorsale
et l’enracinement.
Point positif : l’émission,
bien que perturbée par les anomalies techniques décrites plus haut, se
réalise toujours dans une certaine souplesse ; la voix sort diminuée,
parfois un peu écrasée… mais jamais forcée.
Notre décision
La
voix de Pierre-Henri n’était pas abîmée mais seulement à former ! Un
bon travail technique lui donnerait consistance et éclat, j’en étais
convaincu… mais (il y a un mais…) à condition toutefois que son
problème « psychologique » soit abordé parallèlement pour pallier,
autant que possible, toute interférence.
Pour ces raisons, un « cours vocal intégral » s’imposait. (*)
(*)
C’était en effet la seule approche qui, en plus d’une vocalisation
pointue, comportait en amont de nombreux éléments de détente
(relaxations, massages, taïchi et gymnastique vocale), la seule
susceptible de nous offrir les meilleures chances de succès.
En
toute fin de séance, après lui avoir expliqué mes déductions sur
l’ensemble de son bilan, je lui ai recommandé cette option. Il en
comprit très bien la nécessité et fut d’accord pour l’entreprendre.
Voir le billet : « Le chant thérapie, un travail vocal intégral »
Nous commencerions la semaine suivante.
Le premier cours
Relaxation et massage révélèrent une émotivité à fleur de peau.
Voir le billet : « La relaxation pour mieux chanter »
Cependant,
à force de contrôle sur lui-même, Pierre-Henri est parvenu ce jour-là,
très progressivement, à un certain lâcher prise. Pas suffisant
cependant car, malgré son désir de faire au mieux, il a eu bien du mal
à gérer correctement les tout premiers exercices respiratoires en
position allongée. (*)
(*)
L’inspiration de type vertical dont je parle plus haut empêchait la
réalisation de réactivations diaphragmatiques correctes et jouait
malheureusement ici un rôle négatif difficile à contourner sur
l’instant.
Néanmoins, sa motivation sans
faille confortait ma confiance et je restais convaincu que nos
prochains cours verraient s’éclairer rapidement notre ciel…
Ce jour-là, Pierre-Henri m’a quitté plein d’espoir, après une petite vocalisation générale de fin de cours assez bien réussie…
Les leçons suivantes
Ouf
! A notre deuxième rendez-vous, son lâché prise fut bien meilleur. Son
corps, tellement tendu la dernière fois, s’est abandonné beaucoup plus,
tant en relaxation que durant le massage de détente. Ce relâchement
général a grandement facilité notre travail respiratoire et d’appui en
taïchi ! Cette fois-ci, et j’en fus ravi, les divers exercices proposés
ont pu être menés presque intégralement à bien.
La
vocalisation qui a terminé la leçon – composée en grande partie de
modulations « a/é » destinées à améliorer son ouverture de gorge - fut
très satisfaisante.
Le principe de cette modulation est expliqué dans le billet :
« Une très belle voix en devenir »
Sur
la fin de ce cours, j’avais même pu commencer à lui enseigner les tout
premiers éléments de la gymnastique vocale. Comportant plusieurs
exercices en position penchée, elle nous aiderait – entre autres - à
améliorer plus rapidement son « souffle dorsal » !
Voir le billet : « L’articulation dans le chant »
Petit problème au cours suivant
J’en
fus très surpris mais… sans raison « vraiment » fondée, Pierre-Henri,
en fin de leçon, perdit toute concentration et eut énormément de mal à
synchroniser certains mouvements de la gymnastique que je continuais à
lui enseigner ! (*)
(*)
J’ai immédiatement subodoré que son problème psychologique lui envoyait
quelque écho gênant… tout en restant néanmoins convaincu que cet
épisode n’aurait pas de suite.
Progrès continus
Les
cours qui ont suivi m’ont donné raison. Ils se sont déroulés au mieux.
Avec une concentration de nouveau au top, la gymnastique vocale s’est
progressivement bien intégrée et nos vocalisations de fin de cours ont
continué de donner de très bons résultats sur la voix. Pierre-Henri,
sans en avoir vraiment conscience, a même réalisé plusieurs fois un «
deuxième passage » presque correct sur « â » !
Bref… j’ai assisté en très peu de temps à une importante avancée à tous les niveaux.
Autre point positif :
Il
m’a appris qu’il lui semblait avoir plus de facilité à chanter (en
dehors du cours) et surtout qu’il avait davantage conscience des « sons
» qu’il convenait d’éviter…
Des progrès qui s’affirment !
Lors
des leçons suivantes, le taïchi continua de progresser. Les exercices
respiratoires et d’appui étaient désormais tous menés à bien. Le corps
réagissait de mieux en mieux aux cris contrôlés (équilibre
pneumo-phonique). Pas d’enrouement et une forme vocale conservée
jusqu’à la fin des cours.
Pierre-Henri restait très attentif tout en se « lâchant » de plus en plus : l’idéal ! (*)
(*)
A signaler également qu’il parlait de plus en plus longuement pendant
nos pauses et souriait très souvent. C’était un signe évident de
mieux-être car, au tout début de nos leçons, il restait assez
silencieux.
Un arrêt du souffle mal compris
J’ai
détecté ce problème un jour pendant notre vocalisation. Tout se passait
assez bien dans l’ensemble… mais, à approche de l’aigu (aux environs de
fa3), l’arpège en cours (sur â) n’arrivait jamais à être mené tout à
fait à son terme, un ou deux comas manquant à l’appel pour que la note
la plus aiguë soit parfaitement « dominée » ! Aucun des défauts
habituels n’étant vraiment en cause, un seul facteur me sembla être
responsable de cela : un arrêt du souffle défectueux au départ de
l’arpège !
J’ai vérifié immédiatement la tonicité
de sa sangle abdominale juste avant l’attaque, et je me suis rendu
compte que, bien qu’inspirant désormais correctement, il ne pratiquait
pas le « bon arrêt » du souffle. (*)
(*)
En effet, dans la seconde précédant l’attaque d’un arpège (ou de tout
autre exercice), il est indispensable de stabiliser son souffle en fin
d’inspiration, non pas par une contraction musculaire ferme des
abdominaux, mais par une simple mise en pression de l’air dans le bas
du thorax. Un léger écartement des basses côtes en résulte. Cette
position doit ensuite être maintenue pendant l’exercice ou la phrase
chantée (**)
(**)
« Pour cela, une astuce consiste à s’imaginer, pour maintenir son
diaphragme en position basse tout en chantant, que l’on continue de
dilater la base de son thorax.
Naturellement, c’est tout à fait faut mais, de cette façon, le résultat escompté est obtenu. »
Voir des informations complémentaires sur ce sujet dans le billet :
« L’attaque du son ».
Ce
jour-là, mon chanteur démarrait ses arpèges en assez bonne statique
mais en presque total relâchement abdominal… ce qui perturbait aussi la
qualité de l’attaque ! Ceci expliquait cela ! Après quelques exemples
et essais dûment contrôlés réalisés sur-le-champ, tout est rentré dans
l’ordre ! (*)
(*)
Comme quoi, en technique vocale, chaque détail (où ce que l’on
considère comme tel) revêt quelquefois une importance que l’on ne
soupçonnait pas de prime abord !
J’ai développé, entre autres, cet aspect technique dans les billets :
« Un tout débutant doué »
« Respiration et appui vocal »
« Problème vocal complexe »
Un larynx toujours un peu récalcitrant
Malgré
ses très sérieux progrès généraux, le larynx de Pierre-Henri gardait
une petite tendance à monter un peu trop, dès mi3/fa3 sur la voyelle «
â », gênant le deuxième passage.
Nous avons
travaillé cela en chantant de simples « tenues » sur cette voyelle (de
mi2 à ré3 environ, dans un premier temps), en surveillant drastiquement
le maintien du larynx en position correcte (sans raideur, cela va de
soi). Une fois ré3 obtenu d’une façon répétitive, quelques précisions «
données sur l’instant » (notamment : appui et bâillement du fond de
gorge reprécisés) ont permis d’aborder la zone du deuxième passage mi3
et fa3 dans de meilleures conditions… le larynx restant « relativement
» sage ! (*)
(*) Peu
de temps après, les notes fa3 et fa#3 ont été réussies sur des arpèges
d’accords de quintes relativement lents. Les tenues, très difficiles
sur cette zone de passage, ont été travaillées plus tard et sont
encore, au moment où j’écris ce billet, en cours de perfectionnement…
et le resteront, selon mon expérience, encore un certain temps !
Note importante :
Pour
faciliter le maintien du larynx en bonne place - sur « â » notamment -
trois facteurs revêtent (en plus d’un souffle bien pris et correctement
« arrêté »), une importance capitale !
Juste avant l’attaque :
- Les piliers (pour simplifier : amygdales) doivent être ouverts souplement !
-
La langue doit être large et détendue, en contact non seulement avec
les incisives inférieures avec sa pointe, mais aussi avec les molaires
du bas avec son pourtour…
Pendant l’exercice :
-
Assurer une ouverture « progressive » des maxillaires lors de la
progression vers l’aigu, parallèlement à un bâillement de plus en plus
accentué du fond de gorge !
Voir le billet : « Le bâillement technique du chanteur »
Ouf
! Finalement, assez peu de temps nous a suffi pour obtenir un résultat
relativement satisfaisant sur des tenues (brèves, s’entend).
Pierre-Henri, même s’il s’est montré un peu surpris par un « ressenti »
forcément tout nouveau pour lui, a réussi assez vite, grâce à une bonne
position linguale et à une meilleure ouverture des maxillaires dès le
haut médium, à tenir brièvement (environ deux à trois secondes) des
fa3/fa#3 sans ascension laryngée exagérée. (*)
(*)
Comme dit plus haut, ce bon résultat s’était d’abord vérifié sur des
arpèges d’accords de quintes, chantés tout d’abord d’une façon assez «
dynamique » puis, résultat acquis, plus lentement !
Messa di voce i/é en sommet d’arpège
Pierre-Henri
continuant à faire des progrès conséquents, j’ai pu lui faire aborder
assez vite d’autres exercices réputés difficiles.
Notamment
ceux de réaliser en voix pleine, avec les voyelles « fermées » i/é, une
« messa di voce » au sommet d’un arpège d’accord parfait « lancé » (*)
(*)
Je rappelle que la « messa di voce » consiste à commencer un son dans
une nuance piano, à l’amener progressivement à un forte puis à le
diminuer de nouveau jusqu’à la nuance piano initiale. C’est une
pratique vocale difficile mais extrêmement « payante » lorsque le
chanteur s’en est rendu maître.
Dans l’exercice
dont il est question, la « messa di voce » ayant lieu au sommet d’un «
arpège d’accord parfait lancé », les trois premières notes de cet
arpège (do2 mi2 sol2, en do majeur) devront être relativement rapides
et généreuses. La MDV sera commencée par un piano subito réalisé
toujours en voix pleine sur la dernière note de l’arpège (do3 en
l’occurrence). Suivront – sur do3 - le crescendo et le decrescendo
propres à la « messa di voce ». A la toute fin du decrescendo, sans
reprendre haleine, l’arpège sera redescendu en soutenant bien chaque
note.
On alternera : un arpège sur « i », le suivant sur « é ».
(*) Le « piano subito » bien réalisé en voix pleine a l’avantage d’assurer à la MDV un appui de qualité.
Cet exercice est difficile, je me répète sciemment !
Lorsqu’il
sera bien réussi sur les deux voyelles fermées i/é, on ajoutera aux
deux autres, un arpège sur « â »… ce qui constitue une autre paire de
manches avec cette voyelle « ouverte » et « plus large » qu’il
conviendra de canaliser… sans la serrer !
Pour
mon compte, je conseille de ne pas dépasser le haut-médium dans un
premier temps (mi3 pour un ténor). Puis, cette première « phase » étant
réussie d’une façon récurrente, d’essayer l’exercice sur la zone de
transition (fa3/fa#3), poursuivre enfin au-delà du deuxième passage,
sans dépasser sol#3 ! (*)
(*)
Cet ambitus de travail s’adresse à un ténor ; le baryton se contentera,
dans cette dernière phase, de ré3/mib3, et la basse de si3/do3 !
La
suite logique des exercices précédents consistera en une modulation
chantée au sommet de l’arpège. Je la fais souvent pratiquer sur les
voyelles éiâéi, mais d’autres combinaisons plus favorables à l’élève
peuvent bien sûr être choisies, notamment âéiôui, qui se révèle souvent
plus accessible pour certains.
Naturellement,
comme pour les exercices de « messa di voce », la voyelle qui débute la
modulation sera attaquée piano, dans une amorce de bâillement… et
immédiatement renforcée. (*)
(*) Avec Pierre-Henri, nous essayons désormais, avec plus ou moins de succès, ces exercices à chaque cours.
Pour plus de détails, voir les billets :
« La couverture de la voix, première partie »
« La couverture de la voix, deuxième partie »
Petite précision
Naturellement,
il va de soi qu’un débutant, même très doué, devra faire un sérieux
travail préalable avant de se lancer dans l’entraînement indiqué
ci-dessus. Par exemple, la toute première des choses est d’apprendre à
émettre les voyelles fermées « i/é » sans les serrer (dans une amorce
de bâillement), la bouche entrouverte de deux doigts environ, avec des
exercices simples, dans un ambitus raisonnable, en évitant tout «
challenge ». L’essentiel est de chanter correctement les voyelles, en
acceptant la petite déformation de sonorité due à l’ouverture buccale
d’environ deux doigts qu’il convient de conserver. Ensuite - et
seulement ensuite - on pourra aborder les arpèges, d’abord sans nuances
spéciales, puis avec des « messa di voce », comme décrit plus haut. (*)
(*) Pendant ces exercices, ne pas oublier de respecter une bonne verticalité et un ancrage correct.
J’ai expliqué en détail la marche à suivre de ce travail préparatoire sur les voyelles fermées dans le billet :
« L’équilibre vocal 2 ».
Caro mio ben
J’avais demandé à Pierre-Henri de jeter un coup
d’œil sur quelques « arie antiche ». Il s’était procuré le recueil
conseillé et un jour, ayant un peu de temps en toute fin de cours, nous
avons essayé « Caro mio ben ».
Je m’attendais à
devoir intervenir de nombreuses fois… il n’en fut rien. A part quelques
hésitations (car, en fait, mon chanteur ne connaissait qu’un peu cet
aria…), je fus surpris de la facilité avec laquelle il l’a interprété !
Pour un premier « jet », ce n’était pas mal du tout !
Il
nous faudra affirmer un peu l’ensemble pour avoir un résultat vraiment
correct mais… ce premier essai laissait présager un beau futur !
J’ai
naturellement complimenté mon ténor comme il se devait ! Tout content,
il me confia alors avoir essayé (et assez bien réussi, pensait-il) chez
lui « Dalla sua pace » de Don Giovanni !
Bien…
lui ai-je gentiment rétorqué, mais nous verrons ça un peu plus tard !
Pour l’instant cet air me semble encore un peu difficile…
L’aspect psychologique
Il
continuait incontestablement de s’améliorer. Je sentais Pierre-Henri de
plus en plus à l’aise pendant les leçons : il se « lâchait » davantage
dans nos moments de discussion (pendant les pauses), mais conservait
(et c’est extrêmement important), une concentration optimale pendant le
travail technique ! Quelques petits soucis d’ouverture des maxillaires,
dus à son problème de « bruxisme » demeuraient cependant. En fait, la
peur de ressentir une douleur limitait « inconsciemment » son
bâillement à l’approche de l’aigu. Nous en avons parlé. Ce handicap ne
devrait pas perdurer très longtemps.
Epilogue
Chaque
leçon comporte maintenant plusieurs Arie Antiche. Ces pièces musicales
en italien sont excellentes pour aider à former les voix à condition,
bien entendu, de posséder d’assez bonnes bases techniques générales, ce
qui était désormais le cas de Pierre-Henri. Nous continuons d’améliorer
les différents exercices de « messa di voce » et de couverture des
voyelles ouvertes… tout cela avance doucement mais… sûrement.
Les
nombreux « écueils » de « Dalla sua pace » (où les aigus se trouvent
principalement sur la zone de passage) sont travaillés pratiquement à
chaque leçon.
Lorsque cet air sera chanté
correctement, nous aurons beaucoup avancé. Ce n’est pas encore tout à
fait le cas aujourd’hui mais Pierre-Henri est maintenant sur de bons
rails. Il est évident que ce morceau de bravoure lui conviendra
parfaitement lorsque certains petits problèmes l’enracinement de l’aigu
et d’attaques - de consonnes notamment - seront réglés… c’est-à-dire,
j’espère, dans très peu de temps !
Son ciel est de plus en plus clair.
A bientôt ?
Pour consulter les archives des billets actu… c’est ici !

Jean Laforêt